#7 le fil

L'hiver continue de danser avec le printemps, les jours là dedans s'y perdent un peu. Il fait vraiment beau depuis des jours, mais quand on rentre à pieds après l'heure du dernier bus je suis bien contente de ne pas avoir encore échangé mon long manteau contre ma veste d'automne. Et puis la neige a fondu sur le chemin du matin, il n'en reste plus que sur les bas cotés et sur les terrains où ils l'avaient déposée en gros tas.

Aussi il y a eu la longue semaine hors du temps. On a prit l'autoroute pour quitter la ville et on s'est arrêtés au bord du fleuve un peu plus loin. On s'est promenés le long de l'eau, parfois gelée, sur la rive nord. Les nuits dans la campagne sont sans nuage et quand on s'éloigne de la ville on voit des milliers d'étoiles. C'est comme ça dans pas mal de campagnes on dirait... Alors on a étiré les jours au maximum mais il a fallu rentrer. Là je me suis demandée comment je ferais pour partir d'ici.

A cause de lui, la bande son de ma vie ces dernières semaines collerait parfaitement aux épisodes d'une série américaine à la one tree hill. Mais il n'y a que la musique, mes jours à moi ont les psychodrames en moins... Après cette longue semaine trop courte tout à repris sa place. Les jours qui coulent de sources. Sauf que quand le bus s'est arrêté dans la côte au bord de la vieille ville j'ai crié quand je les ai vu démolir la vieille façade en ruine. Et j'étais encore sous le choc quand je l'ai croisée quelques rues plus tard.

Elle vient d'une province éloignée, à l'autre bout du pays, pas loin de l'autre océan. La première fois j'ai cru qu'elle était sud américaine alors qu'en fait elle est d'ici, de ce pays. Ses ancêtres étaient là bien avant que celui qui a sa statue sur la place ne débarque. La première fois il y avait eu les guitares et le violon, je l'avais accompagnée pour récupérer son accordéon. Cette fois après 25 minutes à discuter sur le trottoir on s'est dit qu'il ferait plus chaud autour chocolat chaud. Parce que même si on dirait le printemps, même quand on est en plein soleil, si on ne bouge plus c'est foutu ! Et cette journée, comme toutes celles qu'on a pu passer ensemble, comme toutes celles de sa vie à elle peut-être, était entourée d'une magie presque visible à l'oeil nu. Chaque fois que j'ai passé du temps avec elle, ça m'a donné assez d'énergie pour tenir jusqu'à la fois suivante. Dans le bus qui m'a ramené chez moi ce soir là je me demandais si j'aurais encore de l'énergie quand je ne serais plus ici.

J'aime la douceur de ma vie, j'aime les évidences et la simplicité. En fait je l'aime sa musique de série télé. Comment je ferais pour partir d'ici ?